Mardi 4 octobre

La campagne

La Commission électorale centrale modifie les règles de publicité électorale

La Commission électorale centrale (CEC) a adopté une nouvelle règle selon laquelle seuls les médias nationaux (presse écrite, radios et télévisions) pourront informer les Bulgares de la tenue et du contenu du référendum. C’est donc à eux seuls que pourront s’adresser les partis et les coalitions qui ne bénéficient pas de subventions et les comités d’initiatives. Tous ces acteurs pourront bénéficier de 40 000 leva selon le Code électoral pour sensibiliser à leurs positions dans le cadre de la campagne référendaire ou pour présenter les candidats soutenus à l’élection présidentielle. Ainsi, les médias en ligne et les médias régionaux n’auront pas la possibilité de participer à cette campagne d’information financée par le budget de l’Etat.

Cette décision de principe, prise vendredi en concertation avec le ministère des finances et adoptée hier par 13 voix contre 6, vient en réponse à des pratiques scandaleuses d’utilisation des deniers publics révélées lors du dernier référendum sur le vote électronique. Beaucoup de comités d’initiative avaient affecté cet argent à un seul site en ligne de publicité factice. Cette manœuvre pour détourner des centaines de milliers de leva avait été révélée à la CEC par des experts. Cependant, l’institution s’est avérée incapable de s’opposer et d’établir formellement les violations. Il y a un mois, la présidente de la CEC avait défendu la thèse de l’impossibilité d’assurer un suivi des publications dans le cadre de la campagne électorale afin de détecter d’éventuels abus de ces fonds.

C’est notamment Mme Ivilina Aleksieva qui serait à l’origine de cette décision, souligne la journaliste Polina Paounova. Avant d’être élue à la tête de la CEC par la 42e législature du Parlement, Mme Aleksieva était directement liée aux représentants des comités d’initiative ayant abusé de cet argent lors du précédent référendum. La plupart d’eux étaient liés à l’Institut de politique moderne, une ONG au conseil d’administration de laquelle participait Mme Aleksieva, souligne la journaliste.

Au lieu de résoudre le problème, la CEC tente de remédier à une erreur par une autre erreur, s’indigne Mme Paounova. Elle suppose que le texte adopté est mal rédigé à dessein afin qu’il soit attaqué auprès de la Cour administrative suprême (CAS). « Il y a déjà une action en justice intentée contre cette décision et dans la mesure où elle ne repose sur aucune base juridique et qu’elle n’est pas conforme à l’esprit même de la Constitution, elle sera sûrement annulée », a reconnu devant Mediapool l’un des membres de la CEC.

Au sein de la CEC, on suppose que ce texte juridiquement absurde a été adopté grâce aux voix du GERB et du MDL, afin que la CEC puisse se justifier après l’annulation probable de cette disposition en arguant d’avoir tenté de mettre fin à l’abus de cet argent avant de revenir à l’ancienne pratique de répartition incontrôlée de ces fonds.

Aleksandar Andreev (PSB), Kamelia Neïkova (PSB) et Tsvetozar Tomov (GERB), tous trois porte-parole de la CEC, ainsi que les autres membres socialistes de la CEC, Rossitsa Mateva, Roumiana Siderova et Tania Tsaneva, ont voté contre la discrimination des médias régionaux et des sites électroniques.

Beaucoup de médias, des partis politiques et des comités d’initiatives ont d’ores et déjà déclaré leur indignation et envisagent d’agir en justice. Le Parti populaire uni de Maria Capon a introduit un recours auprès de la CAS. Le rédacteur en chef du site vevesti.bg a appelé ses collègues à agir ensemble contre la décision de la CEC. (Sega, mediapool.bg, dnevnik.bg)

Le commentaire

Référendum en Hongrie : les médias bulgares voient midi à leur porte

Les médias bulgares sont divisés dans leur interprétation du résultat du référendum en Hongrie contre les décisions européennes relatives à l’accueil des réfugiés, organisé ce dimanche par le premier ministre Viktor Orbán. Dans leur majorité, les journaux et les envoyés spéciaux des télévisions mettent l’accent sur le faible taux de participation largement en dessous du quorum requis, qui invalide juridiquement la consultation. Mais certains commentaires applaudissent la « fermeté » des Hongrois qui ont voté « non » (plus de 98% des voies) à la question : « voulez-vous que l’Union européenne puisse ordonner l’installation obligatoire en Hongrie de citoyens non hongrois, et ce même sans l’aval du Parlement ? ».

Le mot « invalide » est le plus souvent utilisé pour décrire le scrutin. « Plus de 95% des Hongrois ont soutenu la politique d’Orbán contre les migrants dans un référendum invalide », écrit Mediapool qui parle d’un scrutin « raté ». « La Hongrie a dit « non » aux quotas pour les réfugiés, mais le vote est invalide » ; « Le référendum en Hongrie est invalide » ; « Le référendum en Hongrie a échoué », ajoutent Nova TV, la BNR et Bloomberg TV.

La télévision Europe voit dans le faible taux de participation une protestation contre le populisme du premier ministre hongrois. Cependant, ajoute la chaîne d’information, cet épisode doit alerter sur les sérieux processus en cours dans les Etats membres ; ces tendances doivent être analysées par Bruxelles. La crise migratoire est en train de créer un danger réel que des partis populistes et antisémites gagnent le pouvoir dans des pays comme
l’Allemagne, la France ou l’Autriche.

Cependant pour 24 tchassa, « Orbán est en train de sauver l’Europe tandis que celle-ci l’abreuve d’injures ». Selon le journaliste Valeri Naïdenov, le « non » l’a remporté de manière « jivkovienne » ; Orbán « a obtenu un succès stalinien de manière démocratique ». Les Hongrois ont crié « non » à « l’oligarchie bureaucratique européenne ». Au temps du communisme, les autorités n’ont jamais jouit de tels succès, la Hongrie étant alors « un pays de dissidents ». « Ils ne se sont sûrement pas évaporés aujourd’hui, tout simplement ils se sont unis en soutien du pouvoir », avance le journaliste.

Le référendum est présenté en Bulgarie comme anti-bulgare, car la question posée est vue par certains comme néfaste aux intérêts nationaux bulgares, écrit M. Naïdenov. La lecture faite de la question posée est qu’elle laisse sous-entendre que les migrants qui sont entrés en Hongrie par la Bulgarie doivent être renvoyés vers ce pays. Mais, selon M. Naïdenov, une telle interprétation est fausse. « Selon Orbán et selon 90% des Européens la réponse est toute simple : que chacun retourne là d’où il vient ». Mais pour cela, il faudrait « que l’UE fasse une frontière extérieure en fer », ce qui aurait été possible avec seulement une partie du financement octroyé à la Turquie, regrette le journaliste.

Les pays qui n’acceptent pas « le multiculturalisme ultra-accueillant de Bruxelles » ont en commun d’avoir été des « peuples envahis par les Ottomans ou au moins qui étaient en guerre avec eux au Moyen Age. A la différence des Belges et des Allemands, ces peuples savent de quoi il s’agit et leur mémoire historique n’est pas tuée ». L’auteur assure qu’un référendum semblable remporterait le même résultat en Bulgarie et qualifie de grave erreur un accord éventuel de la part du gouvernement d’accueillir des migrants dans le pays et « de peupler avec eux les villages inhabités ». (tous journaux, dnevnik.bg, mediapool.bg, bnr.bg, nova.bg, tvevropa.com, bloomberg.bg)

L’analyse

A un mois de l’élection présidentielle, un sociologue soupèse les chances des candidats et prédit la victoire au GERB

Le sociologue Youliï Pavlov du Centre pour les analyses et le marketing examine, dans une interview pour Standard, le rapport de forces entre les différents candidats en lice, tel qu’il se présente à la veille du lancement officiel de la campagne électorale (6 octobre).

Qu’elle soit ou non la candidature la plus réussie du GERB, Tsetska Tsatcheva reste quand même une protagoniste qui a toutes les chances d’être élue. Et, une fois élue, elle fera un bon président de la République, estime M. Pavlov. Plusieurs éléments le présagent : « une politicienne de type occidental, pragmatique, qui a déjà tissé de très bons contacts internationaux en sa qualité de chef du parlement ». Avec Mme Tsatcheva au poste le plus élevé du pays, le gouvernement pourra être sûr d’avoir à l’avenir une seule et unique ligne de politique étrangère et non pas deux, comme c’était le cas durant le mandat de M. Plevneliev, souligne le sociologue.

Quant au pari fait par le premier ministre au lendemain de sa désignation de sa candidate (« Si le GERB perd l’élection au premier tour, le gouvernement donnera le jour même sa démission »), il n’a rien d’une démarche risquée, indique M. Pavlov. En principe, il ne faut pas établir un lien entre élection présidentielle et élections législatives. Toutefois, la présidentielle de cette année sera très spécifique : la lutte ne sera pas entre des candidats, mais entre des partis, surtout au premier tour. Et si le GERB perd au premier tour, il serait logique que le gouvernement démissionne. Une sorte de « motion de censure », un désaveu pour le parti et non pas pour le candidat.

« Mais justement parce que la compétition sera entre partis, je n’attends aucune surprise. Le candidat du GERB recueillera deux fois plus de voix que le candidat socialiste. Quelle que soit sa candidature, le soutien au premier tour lui est garanti », relève M. Pavlov. Très probablement, le parti du premier ministre arrivera à mobiliser près de 1,1 million de voix. Le président Plevneliev avait reçu le soutien de 1,3 million d’électeurs, mais depuis, la situation démographique a changé, ainsi que l’intérêt des gens pour la politique.

Interrogé sur la candidature socialiste, M. Pavlov estime que le fait que celle-ci ait été présentée au nom d’un comité d’initiative posera problème quant à la perception de l’appartenance politique du général Radev par les sympathisants du PSB. Celui-ci reste mal identifiable en dehors du noyau dur de ce parti. « Sur le bulletin de vote, il ne sera pas écrit ‘PSB’. Vous n’aurez qu’un nom (Roumen Radev), pas de civilité, et, en face de ce nom, ‘comité d’initiative’ ». Ce petit détail ne permettra pas au PSB de mobiliser, comme d’habitude, ses 900 000 voix et le parti devra se contenter d’un résultat de l’ordre de 650 000 à 700 000 voix.

Le second tour, prédit le sociologue, aura lieu entre le candidat arrivé en tête (Mme Tsatcheva) et le candidat suivant (Roumen Radev). Le GERB n’aura pas la force suffisante pour emporter l’élection dès le premier tour même si sa candidate réussit l’exploit d’obtenir plus de 50% des votes exprimés. En effet, selon la loi, pour que le président de la République soit élu dès le premier tour, il faut qu’il soit soutenu de plus de la moitié des électeurs. Alors que, très certainement, 3,5 millions Bulgares ne se rendront pas aux urnes dans un mois pour plébisciter Mme Tsatcheva.

Krassimir Karakatchanov, le candidat des nationalistes (Front patriotique plus Ataka) aura du mal à faire fructifier sa rhétorique sur les réfugiés. Quand même, il arrivera en troisième position et le maximum de voix qu’il essaiera de réunir varie autour de 400 000 à 450 000 voix. Donc, il n’aura la moindre chance de déplacer le tandem du PSB de sa participation au second tour, « sauf si le général Radev ne commet une grosse bévue ».

La quatrième place, selon M. Pavlov, sera réservée au candidat du Bloc réformateur, Traïtcho Traïkov, alors que la cinquième sera disputée entre Ivaïlo Kalfine (ABC), Tatiana Dontcheva (Mouvement 21), Plamen Orecharski (à condition qu’il soit soutenu par le MDL), voire entre George Gantchev (ancien député, fondateur du parti Business Bloc) et Svetoslav Vitkov (chanteur, conseiller municipal à Sofia et fondateur du parti Voix du peuple qui a réussi, aux dernières législatives, à dépasser le cap de 1% nécessaire pour obtenir une subvention publique).

Quant au vote de protestation, il n’arrivera pas à secouer l’hégémonie du GERB. Lors du second tour, les sympathisants du Front patriotique et des réformateurs soutiendront Mme Tsatcheva : même s’ils décident de ne pas soutenir le GERB, ils ne donneront jamais leur voix au PSB. En ce qui concerne le MDL, ses sympathisants peuvent voter GERB ou simplement s’abstenir, mais en aucun cas ils ne soutiendront les socialistes. Par conséquent, le soutien pour Mme Tsatcheva au second tour gonflera, alors que le général Radev ne pourra compter que sur le faible soutien de certains des sympathisants des autres candidats de gauche, Ivaïlo Kalfine ou Tatiana Dontcheva, conclut le sociologue. (Standart)

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Dernière modification : 21/11/2016

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