Lundi 12 septembre

La substitution

Élection du secrétaire général des Nations Unies : la Bulgarie serait sur le point de changer de candidature

Depuis trois jours les noms de deux femmes bulgares, hauts fonctionnaires internationales, défraient la chronique internationale et semblent au cœur des débats des décideurs les plus puissants du monde. Il s’agit d’Irina Bokova, directrice générale de l’Unesco et candidate officielle de la Bulgarie au secrétariat général de l’ONU et de Kristalina Gueorguieva, vice-présidente de la Commission européenne et candidate potentielle par laquelle selon certaines sources la Bulgarie envisagerait de remplacer celle de Mme Bokova.

Samedi matin, les médias bulgares, se référant à des sources gouvernementales anonymes, ont informé de la possibilité que le gouvernement décide, lors d’une réunion extraordinaire du conseil des ministres mardi, de désigner officiellement la candidature de Kristalina Gueorguieva au secrétariat général de l’ONU à la place de celle d’Irina Bokova, après que celle-ci a été rétrogradée à la cinquième place lors du quatrième vote indicatif du 9 septembre (voir la revue du 9 septembre).

Cette information est venue quelques heures seulement après le tweet, publiée par Talal al-Hadj, chef du bureau de la chaîne de télévision Al-Arabiya auprès de l’ONU, par lequel celui-ci annonçait que « la Hongrie, la Lituanie et la Croatie envisagent de présenter avec le soutien de l’Allemagne la candidature de la commissaire européenne bulgare au secrétariat général de l’ONU ». Celui-ci précisait dans un deuxième tweet que « désignée par trois Etats européens de l’Europe de l’Est, Mme Gueorguieva serait la candidature du PPE ». Selon ce second tweet, le projet de cette candidature bulgare alternative serait finalisé lors d’entretiens en marge du dernier sommet de G-20 en Chine.

« Cette décision relèvera de la seule discrétion du premier ministre après évaluation de la situation et en consultation avec d’autres pays. A l’heure actuelle, il n’y a pas de proposition officielle de la part du gouvernement. S’il doit y en avoir une, elle sera annoncée d’ici la fin de la journée de lundi", a déclaré dimanche Roumiana Batchvarova, vice-première ministre et ministre de l’Intérieur.

Lundi matin, dans le bloc matinal de la chaîne Nova, Mme Batchvarova a ajouté que « la présentation de Mme Bokova [lors des votes indicatifs] jusqu’à maintenant n’est pas convaincante et qu’on ne peut pas compter sur une bonne décision définitive [concernant sa candidature] ».

Entretemps, un tweet lancé dimanche par le chef de cabinet de Jean-Claude Juncker Martin Selmayr, est venu alimenter le doute : « Ce serait une grande perte pour le Commission européenne. Mais Kristalina sera un très fort secrétaire général de l’ONU et rendra fiers beaucoup d’Européens ».

Toutes ces informations ont été reprises dans un long article de l’agence Reuters qui soulève des questions qui restent ouvertes comme par exemple : « Mme Bokova renoncera-t-elle à la compétition pour permettre au gouvernement bulgare de présenter la candidature de Mme Gueorguieva ? Est-il possible que la Bulgarie ait deux candidatures ou la commissaire européenne bulgare devra-t-elle être désignée comme candidate par un autre Etat ? ». Selon cet article de Reuters, le premier ministre bulgare serait dans une situation difficile et n’aurait pas encore pris de décision. Les porte-parole des gouvernements hongrois et allemand ont refusé de commenter les allégations relatives à une entrée en lice de Mme Gueorguieva.

Interrogée à ce sujet, Maria Zakharova, porte-parole du ministère des affaires étrangères russe, a révélé que la chancelière Merkel avait étudié la possibilité que la Russie soutienne un deuxième candidat bulgare à la place de la candidature officielle en marge du sommet de G-20 en Chine. « En réponse, la Russie a fait savoir à Mme Merkel que la désignation d’un candidat au poste de secrétaire général de l’ONU relève de la seule décision souveraine de l’Etat. Les tentatives d’influencer la décision des pays sont inacceptables et les informations dans la presse bulgare concernant la possibilité que la Russie soutiennent de tels actes sont mensongères ».

Dmitriï Peskov, porte-parole du président Vladimir Poutine, a également démenti les informations selon lesquelles la Russie se serait mise d’accord pour soutenir un autre candidat bulgare en substitution de la candidature officielle.

Changer de candidate en cours de procédure n’est pas un précédent. Selon 24 tchassa, Irina Bokova ne dispose plus que de quinze jours pour faire ses preuves. Si lors du prochain vote indicatif du 26 septembre, elle ne parvient pas à obtenir l’une des trois premières places, deux scénarios seront possibles : se retirer elle-même ou se voir officiellement remplacer par le gouvernement.

Konstantin Sabtchev, de Standart, veut voir le côté positif de ces péripéties. Dans son analyse intitulée « Le temps des femmes bulgares est venu » il conclut que « quoi qu’il en soit la Russie et l’Allemagne se seront disputées sur la question de savoir laquelle de deux Bulgares est meilleure pour occuper le plus haut poste à l’international. Et ça, c’est une première ». (tous journaux, club Z, madiapool.bg)

Les projets

Crise migratoire : la Bulgarie envisage l’ouverture de nouveaux centres pour réfugiés

Les autorités visitent différents sites dans le pays avec l’intention d’ouvrir de nouveaux centres pour réfugiés, a annoncé le secrétaire général de la police. Gueorgui Kostov a expliqué cette décision par la saturation des centres existants. Selon la police, les centres de l’Agence pour les réfugiés sont pleins à presque 80%. Quant aux centres de type fermé, gérés par la direction des migrations auprès du ministère de l’intérieur, leur capacité est déjà dépassée (voir la revue du 7 septembre). La ministre de l’intérieur Roumiana Batchvarova a précisé qu’une hausse de la pression migratoire par rapport aux mois précédents est observée, sans qu’on atteigne les effectifs constatés l’année dernière à la même époque.

M. Kostov a refusé de nommer les villes près desquelles les autorités envisagent de créer de nouveaux centres. Selon Standart, la raison de ce silence serait la peur du gouvernement de la réaction négative et des manifestations éventuelles de la part des populations concernées. Le journal cite ses propres sources, selon lesquelles la police et le ministère de la défense envisagent de reconvertir en centres d’accueil trois anciennes casernes ou bases militaires à Boianovo (près d’Elhovo), Radomir et Kresna. Les habitants de ces deux dernières villes ont déjà organisé des manifestations contre de tels plans. Il est également question de créer un centre près de Roussé pour accueillir les migrants qui ont réussi à franchir la Stara planina et ont été arrêtés dans le nord du pays.

Les habitants de Harmanli sont également opposés au plan d’élargissement de la capacité d’accueil du centre de leur ville, qui à présent est presque rempli. Selon le directeur de celui-ci, près de 50 migrants arrivent chaque jour dans le centre. Il y a encore quelques semaines, ils partaient tous sitôt après avoir déposé une demande d’asile. Mais désormais, presque tous les migrants restent dans le centre, explique Yordan Malinov. Le centre, à présent de type ouvert, doit être parallèlement converti en type fermé et sa sécurité sera assurée par la police. Mme Batchvarova a également annoncé que la même décision est prise pour le centre de Bousmantsi (banlieue de Sofia). Dans ces parties des centres seront logés des migrants avec des dossiers criminels, de pays d’origine incertaine ou qui ont commis des délits lors de leur séjour en Bulgarie.

Le médiateur bulgare Maya Manolova a exprimé sa préoccupation devant la situation dans les centres de réfugiés lors de son entretien avec des représentants d’Amnesty International. Elle a signalé qu’elle envisage de rencontrer les dirigeants de l’Agence pour les réfugiés. La création des espaces de types fermé dans les centres est acceptable uniquement dans un cadre de respect des standards de vie prévus ; mais « selon mon évaluation subjective, ce serait impossible en Bulgarie », a souligné Mme Manolova.

Les médias reprennent les propos du président du Conseil européen qui a déclaré son intention de demander aux Etats membres d’aider la Bulgarie lors du sommet de Bratislava. De l’aide concrète, du personnel et de l’équipement sont indispensables à la Bulgarie, a déclaré Donald Tusk lors de sa visite à Tallinn.
La crise migratoire sera au centre de la visite des premiers ministres serbe et hongrois à Sofia le 13 septembre. Le lendemain, le premier ministre bulgare Boïko Borissov et son homologue hongrois Viktor Orbán visiteront la clôture à la frontière de la Bulgarie avec la Turquie. (tous journaux)

La confession

Selon Tsvetan Vassilev, « depuis 2009, la mafia est au pouvoir et essaie de tirer profit de tout »

Une interview au site KTBfiles accordée par le banquier Tsvetan Vassilev, ancien propriétaire majoritaire de la KTB, met au grand jour de nouveaux faits sur la corruption politique en Bulgarie. Ce site, créé par trois ONGs bulgares (le Centre pour des stratégies libérales, le Programme Accès à l’information et Transparency International) cherche à faire la lumière sur l’effondrement de la quatrième grande banque bulgare et à élucider les mécanismes de capture de l’Etat par les intérêts privés.

Les propos de M. Vassilev concernent plus spécialement des faits remontant à l’arrivée au pouvoir du premier gouvernement Borissov. « Depuis 2009, en Bulgarie, la mafia est au pouvoir et essaie de tout contrôler, de tirer profit de tout », affirme-t-il. Il révèle pour la première fois les propriétaires réels de l’entreprise Bulgartabac après la privatisation définitive de celle-ci en 2011 : d’un côté, le tandem qu’il constituait alors avec Delian Peevski, financé par la KTB, et, de l’autre, Vinprom Pechtera, fabricant de spiritueux. Cependant, ajoute l’ex-banquier, au moment de la répartition des parts, trois autres personnes ont également obtenu des prises de participation. Selon M. Peevski, pour que la transaction ait des chances d’aboutir, il fallait graisser la patte (sous forme de « bonus » individuels de 10% sur la part de 80% de Bulgartabac à privatiser) du premier ministre Borissov, du leader du MDL, Ahmed Dogan, et d’un jeune homme d’affaires, Alexandre Staliïski.

Plus loin, M. Vassilev présente Alexandre Staliïski [NdR : fils d’un ancien ministre de la défense (1992) du même nom] comme l’homme lige de M. Borissov. « A cette époque, au moins. On dit maintenant qu’il a perdu les bonnes grâces du premier ministre. Il s’occupait de tout ce qui était lié à M. Borissov, y compris comme collecteur de dettes », précise M. Vassilev. L’argent extorqué était collecté sous différentes formes, y compris sous forme de prises de participation, réelles ou dissimulées, dans des entreprises. « Une des raisons de ma visite chez M. Borissov, le 6 juin 2014, c’était de lui montrer l’ampleur de ce que prélevaient Staliïski et ses hommes », ajoute M. Vassilev. [Ndr : au moment de l’effondrement de la KTB, M. Staliïski détient des dépôts à hauteur de 30 millions de leva qu’il réussit à récupérer par maintes opérations de cessions et de compensations. Il participe également au dépècement des actifs de la banque et acquiert la verrerie Rubin, à Pleven, en février 2015.]

Le 6 juin 2014, M. Vassilev rencontre également MM. Dogan et Stanichev, dans un ultime effort de sauver sa banque contre laquelle des attaques massives ont entretemps commencé dans la presse contrôlée par M. Peevski. Aujourd’hui, il estime que, finalement, une entente entre ce dernier et le premier ministre (« ma tête y était mise à prix », dit le banquier) a décidé du sort de la banque. Le début de « ma séparation avec M. Peevski remonte à la venue au pouvoir du gouvernement Orecharski [fin mai 2013] ». Vers septembre 2013, M. Peevski avait déjà réussi à prendre la place de toute la piétaille autour du premier ministre et, à lui seul, avait réussi à tout avaler, à tout envahir. C’est aussi l’époque du boom des marchés publics gagnés par sa société Vodstroï (sur chaque marché, M. Peevski et les représentants politiques touchent une commission de 10 à 15% ; la mise en œuvre est laissée ensuite à des sous-traitants, affirme M. Vassilev), de la « gestion » des cadres dans la justice et dans la DANS par le jeune député Peevski. « Il était partout et moi, j’ai été terrifié d’apprendre qu’il avait obtenu tout cela en abusant de mon nom : M. Vassilev demande ceci, M. Vassilev a besoin de cela », se rappelle le banquier.

Enfin, un beau jour, M. Peevski a envoyé un intermédiaire à M. Vassilev, muni d’une liste des actifs à répartir entre eux deux. La proposition ayant été repoussée, le banquier a dû boire le calice jusqu’à la lie. « Je pense toutefois, dit-il dans son interview, que le scénario avait été tout autre et que personne ne s’était imaginé que les choses peuvent prendre une telle tournure. […] Si on m’avait arrêté et condamné dans un procès bidon pour tentative d’assassinat de M. Peevski, on aurait peut-être réussi à me faire céder Bromak [société unipersonnelle, détentrice de la KTB] et d’autres actifs à M. Peevski », souligne M. Vassilev.

La banque est devenue victime d’un « raid » de type classique. Après sa fermeture, les actifs ont été répartis entre deux clans, « celui de M. Peevski, qui est partout, et celui du premier ministre », affirme M. Vassilev.

Quels sont les projets du banquier déchu ? Continuer à se battre, surtout à Strasbourg, conclut-il. (ktbfiles.bg, Capital)

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Dernière modification : 25/11/2016

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