Lundi 3 octobre

Le casting

Le GERB mise sur la première femme à la tête de l’Assemblée nationale pour remporter la compétition présidentielle

« Cela fait longtemps que j’entends parler du père de la nation. Beaucoup de personnes ont eu la prétention d’être les pères de cette nation. Il est grand temps que cette nation ait une mère qui materne son peuple et non pas des personnes qui ont du mal à maîtriser leur ego, considérant qu’une fois installées à la présidence, c’est par la force et la pression qu’il faut agir. »

C’est par ces mots que Boïko Borissov, premier ministre, a désigné Tsetska Tsatcheva, présidente de l’Assemblée nationale, comme candidat du GERB à la présidence de la République, à la suite d’un discours de cinquante minutes sur la situation politique à la veille de l’élection présidentielle, tenu à la salle 6 du Palais national de la culture devant les ministres, députés et membres de la direction de son parti, quatre jours avant le début de la campagne électorale.

Fidèle au GERB depuis sa création, Mme Tsatcheva est devenue la première femme à la tête de l’Assemblée nationale en 2009 (41e législature), préside actuellement sa 43e législature, sait calmer toutes les passions politiques et donc assurer l’équilibre au sien de cette institution. Forte de sa connaissance de la législation bulgare, elle est la mieux à même de s’adresser à la Cour constitutionnelle. Les questions de défense ne figurant pas parmi les points forts de Mme Tsatcheva, la commission exécutive du GERB a décidé de confier à Plamen Manouchev, député du quota civil du GERB, ancien chef d’état-major de la marine et ancien adjoint au chef de l’état-major des armées, le mandat d’assister Mme Tsatcheva en tant que vice-président de la République. C’est ainsi que Boïko Borissov a présenté la candidate du GERB.

Avant d’arriver à ce point culminant de son discours, M. Borissov avait fait le tour des autres candidatures étudiées par la commission exécutive, à commencer par la sienne. Participer à cette compétition aurait sûrement été mieux pour lui et pour sa longévité politique mais cela équivaudrait à « déserter l’exécutif qui porte tous les jours atteinte à mon image dans un contexte comme celui d’aujourd’hui et à l’aune des contacts que j’ai, de ce que j’ai fait et de ce que je prévois de faire. Ma longévité politique ne consiste pas en un poste mais en la longévité du GERB ». Il a toutefois confirmé son intention de se présenter à la présidentielle lors de la prochaine échéance en 2021.

« Après moi dans l’ordre venait la candidature de Mme Fandakova [NDR : maire de Sofia depuis 2009] qui aurait pu remporter l’élection dès le premier tour comme tout le monde le sait, et nos opposants en particulier, qui la craignaient. Mais si je devais choisir entre la présidence et Sofia, c’est Sofia qui est la plus importante pour moi ».

« Ensuite, Tomislav Dontchev [NDR : vice-premier ministre, chargé des fonds européens et de la politique économique], qui, bien qu’un peu renfrogné, est mon moteur, mon générateur d’idées. J’ai donc préféré le garder en tant qu’adjoint qui ne vient me voir que lorsqu’il a une solution à me proposer à la différence des autres ».

Enfin, la candidature de Dimitar Nikolov, maire de Bourgas depuis 2007, « qui a transformé Bourgas de sorte que d’un village, c’est devenu la plus belle des villes » impliquerait de dépenser de l’argent pour organiser des élections. « Or, actuellement l’Etat a besoin de cet argent pour les plus défavorisés, pour la clôture à la frontière et pour un tas d’autres dossiers ».

Ces trois autres candidats pressentis ont affirmé leur soutien au tandem désigné par leur parti, vantant à tour de rôle leurs qualités et leur aptitude à assumer les responsabilités de chef d’Etat. Ils se sont engagés à convaincre les Bulgares que « notre tandem et le meilleur ».

Mme Tsatcheva et M. Manouchev ont remercié le parti de leur accorder sa confiance. Le parti assumait la responsabilité du destin de la Bulgarie dans un contexte complexe. Mme Tsatcheva s’est dite dès aujourd’hui engagée dans une compétition d’idées au nom de la Bulgarie qui sera remportée par celui qui sera approuvé par le peuple bulgare. « Forte de l’expérience acquise au parlement bulgare, je ferai de mon mieux pour qu’avec M. Manouchev nous gagnions la confiance du peuple bulgare. Plutôt que de creuser des abîmes, je construirai des ponts. Je serai le garant de la Constitution bulgare et je défendrais les intérêts nationaux. En tant que mère, avocate et juriste, je sais assumer des responsabilités, défendre et soutenir. Bien que je ressente l’amertume accumulée dans le message « l’Union fait la force », j’y crois et ne ménagerai pas mes efforts pour répéter que l’Union porte l’idée de l’unité. Cette unité qui n’exclut pas la diversité inhérente à la démocratie et au pluralisme », a déclaré la candidate.

Selon 24 tchassa, les responsabilités de Mme Tsatcheva à la tête de l’Assemblée nationale seront assumées jusqu’au ballotage par Dimitar Glavtchev, vice-président (GERB) de l’Assemblée nationale, qui pourrait hériter du poste au cas où Mme Tsatcheva serait élue présidente de la République. Elle serait alors la première femme à la tête de l’Etat bulgare. (tous journaux)

La couverture

La désignation de Tsetska Tsatcheva à la présidence de la République : premières réactions

La presse bulgare rend largement compte de la désignation officielle des candidats du GERB à la présidence de la République.

Sega et Troud titrent respectivement à la une « Borissov a choisi Tsetska Tsatcheva pour être la mère de la nation » et « Borissov a désigné la mère de la nation ». Ces deux quotidiens comme d’ailleurs Monitor présentent de manière neutre l’événement.

24 tchassa y consacre tout un dossier qui au-delà de la présentation fidèle et détaillée de la cérémonie officielle et des discours de tous les intervenants inclut plusieurs analyses de politologues (Les points forts et faibles de la candidature de Tsetska Tsatcheva, Parvan Simeonov), sociologues (La candidature de Tsatcheva rend la bataille à gauche au premier tour plus rude, Stanisalv Stoyanov d’Alfa Research) ainsi que des articles qui font le portrait de Mme Tsatcheva et de M. Manouchev. C’est aussi le quotidien auquel Mme Tsatcheva a accordé sa première interview en tant que candidate à la présidence de la République.

« Je construirai des ponts », titre à la une Standart en mettant l’accent sur les personnalités et la campagne des deux candidats. Ce quotidien a recueilli les premières réactions des autres candidats à la compétition. Ceux-ci invitent Mme Tsatcheva à débattre des fonctions et des missions de l’institution présidentielle (I. Kalfin) ainsi que des questions sensibles de l’agenda politique comme la crise des réfugiés, la criminalité conventionnelle, la politique extérieure, l’état de l’armée bulgare (K. Karakatchanov). Standart a également sollicité les commentaires de Parvan Simeonov (Gallup International), selon qui le GERB a misé plutôt sur la logique partisane que sur la popularité [des candidats] et de Neno Dimov (Institut pour une politique de droite), qui considère que Mme Tsatcheva est la candidature la plus à même pour assumer les responsabilités du président dans une république parlementaire.

Capital Daily titre à la une « Borissov a désigné le candidat le plus impopulaire à la présidence de la République » et publie des commentaires surtout critiques à commencer par un extrait de l’analyse de Christo Ivanov, ancien ministre de la justice. Selon M. Ivanov « derrière la candidature formelle de Tsetska Tsatcheva, il y a un consensus tacite pour priver de sens l’institution présidentielle, afin que le pouvoir réel soit concentré dans les mains du premier ministre en dépit de tout ce qui est écrit dans la Constitution ». Ce message est repris dans un commentaire de Christo Christev sur Facebook qui va encore plus loin en concluant que cette candidature a apporté la preuve de l’éclatement du système politique bulgare à la 27e année du début des changements démocratiques.

Enfin, Douma rend logiquement compte des commentaires de Kornelia Ninova, présidente du PSB : « C’est le début de la fin du GERB. Le candidat du GERB est la deuxième édition de Rossen Plevneliev mais en robe ». Selon Mme Ninova la décision de Borissov s’inscrit dans la continuité de sa ligne de décision. « Il est humiliant de choisir un candidat par élimination d’autres possibles candidats, en prétextant leurs qualités et le besoin d’eux au Conseil des ministres, à Sofia et à Bourgas », s’indigne Mme Ninova, qui s’oppose également à une considération de M. Borissov selon laquelle l’institution présidentielle ne peut pas être indépendante du gouvernement. Mme Ninova appelle le peuple bulgare à « se soulever » pour demander un changement dont les porteurs, selon elle, seraient les candidats soutenus par le PSB.

Toujours dans le camp socialiste, le général Roumen Radev, cité par Troud, observe que « nous aurons à faire face à une rude bataille, qui sera probablement la dernière si nous ne voulons pas conserver notre droit démocratique de choisir » (sic). Iliana Yotova, son équipière pour le poste de vice-président de la République, considère dans le même journal que « nous sommes face à un adversaire fort qui ne veut ni débattre ni discuter. Nous devons donc recourir à la coopération de la part des autres tandems de candidats en dehors du GERB ».

Douma a également interviewé Parvan Simeonov sur les chances du PSB au regard de la candidate du GERB. Le politologue considère que Mme Tsatcheva a toutes les chances de devenir présidente de la République dans la mesure où il existe une ingénierie politique qui permet l’apparition d’autres candidats de gauche empêchant le général Radev de mobiliser tous les suffrages de son camp. D’autant plus qu’il y a des adversaires sérieux comme Krassimir Karakatchanov et M. Marechki qui sont sensés pouvoir mobiliser respectivement les votes patriotes et de protestation. Mais, tempère M. Simeonov, la candidature impopulaire et faible de Mme Tsatcheva constitue aussi une opportunité pour le PSB d’avoir un meilleur score. (tous journaux)

L’interdiction

L’adoption de « la loi sur les burqas » est fortement critiquée par des ONG et des experts

« Les burqas sont désormais hors la loi ». Avec ce titre, Sega annonce l’adoption en deuxième lecture (définitive) de la loi sur l’interdiction de la dissimulation complète ou partielle du visage dans l’espace public, connue comme « la loi sur les burqas ». La proposition de loi avait été déposée par le Front patriotique ce printemps. Krassimir Karakatchanov, co-président de la coalition parlementaire et président de l’ORIM, avait précisé que pour rédiger son texte, le Front s’était inspiré de l’expérience de la France et de la Belgique (voir notre revue du 19 mai).

La loi interdit le port de bâches, cagoules, voiles, masques et tout autre accessoire ou vêtement ayant pour effet de dissimuler le visage. Une exemption est faite en cas de nécessité liée à l’état de santé ou exigences professionnelles. Le texte adopté prévoit en cas de non-respect de cette interdiction une amende de 200 leva ou, en cas de récidive, de 1 500 leva. Une amende pour encouragement du port du niqab est également prévue, mais la proposition initiale de peine de jusqu’à trois 3 ans d’emprisonnement pour encouragement n’a finalement pas été adoptée. Le contrôle du respect de cette loi sera exercé par le ministère de l’intérieur.

Les journaux soulignent que le texte a été adopté à la quasi-unanimité sans débat en salle plénière avec les voies des députés du GERB, du Front patriotique, du PSB et du Bloc réformateur. « On a adopté une très bonne loi pour la sécurité de nos enfants », a annoncé Krassimir Veltchev, député GERB. « Cette loi porte une atteinte à la sécurité. Elle ouvre la voie à des forces revanchistes et radicales en quête de vengeance », a répliqué Djeïhan Ibriamov du MDL. Hussein Hafazov de DOST a ajouté que la loi ouvre un clivage dans la société.

Les députés du MDL et de DOST ont été les seuls à s’opposer à la loi. Les membres du MDL ont même quitté la salle plénière en refusant de participer au vote. Les arguments principaux de ces deux partis sont que la loi ne vise pas à protéger la sécurité nationale, mais porte atteinte à un groupe religieux précis. M. Karakatchanov a directement prouvé ces thèses en salle plénière en tranchant que le texte a pour but « de restreindre les tentatives de certains milieux d’utiliser la religion pour créer des confrontations ». Selon lui, la loi aurait également pour but de protéger les musulmans bulgares « de facteurs étrangers ».

L’adoption de la loi a été critiquée par des organisations des droits de l’homme et des experts. Selon Mihail Ekimdjiev, avocat des droits humains, le texte souffre de nombreuses lacunes qui le rendent facilement attaquable auprès de la Cour européenne des droits de l’homme. La position de Krassimir Kanev est similaire. Dans un texte publié dans Dnevnik, le président du Comité Helsinki en Bulgarie qualifie les motifs des députés du front patriotique qui ont initié cette loi comme « islamophobes et xénophobes ». Cette loi n’aidera en aucune façon le « vivre ensemble » ; au contraire, « elle approfondira les sentiments islamophobes et xénophobes sans précédents qui ont ressurgis après que le Front patriotique est devenu partie prenante de la majorité au pouvoir ». Aucun besoin social ne motive l’adoption de cette loi ; par contre elle cache le risque de dégrader les relations entre les groupes religieux et ethniques dans le pays, conclut M. Kanev.

Selon Antonina Jeliazkova, directrice du Centre international d’étude des minorités et des interactions interculturelles, cette loi est une stupidité populiste dépourvue de logique. « Une loi concernant une vingtaine ou trentaine de femmes de la ville de Pazardjik a été adoptée ; est-il possible et normal que le Parlement adopte des lois personnalisées », s’indigne-t-elle dans un commentaire pour Dnevnik. Le Conseil municipal de Pazardjik a été le premier à adopter une telle interdiction au niveau local. Le procureur général s’était prononcé en faveur d’une telle décision et avait fait état d’informations détenues par le Parquet selon lesquelles des femmes de cette ville s’étaient vu proposer de l’argent pour porter le niqab, voir notre [revue du 28 avril]. Mme Jeliazkova cite des musulmans avec lesquels elle travaille sur le terrain, qui lui ont confié que, comme il n’y a pratiquement pas de burqas en Bulgarie, ils se sentent visés à long terme par cette loi. (tous journaux, dnevnik.bg)

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Dernière modification : 03/10/2016

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